LUTTE CONTRE L’ALGUE
“CAULERPA TAXIFOLIA”

 

 Plusieurs motifs juridiques vont dans le sens d’une intervention légale de l’État français (I), ou de la Communauté européenne (II) en vue de l’adoption de mesures contre le développement de l’algue Caulerpa Taxifolia. A ce jour, deux groupes parlementaires ont déposé des propositions de loi demandant une  intervention de l’État français concernant ce problème (III). Donnant aussi leur propre point de vue, les professionnels de la pêche de la Méditerranée soutiennent ces interventions (IV).
 

I) Les motifs juridiques pour une action de l’État français :

 

 Les motifs juridiques internationaux :

 La France est Partie contractante à plusieurs Conventions internationales qui vont dans le sens d’une intervention en faveur de mesures contre le développement de l’algue Caulerpa Taxifolia.

 - Convention de Berne 1979 : article 11.2, la France s’est engagée à  “contrôler strictement l’introduction des espèces non indigènes”.
 - Convention de Montego Bay 1982 : article 196.1, “les États prennent toutes les mesures nécessaires pour prévenir, réduire et maîtriser (...) l’introduction intentionnelle ou accidentelle en une partie du milieu marin d’espèces étrangères ou nouvelles pouvant provoquer des changements considérables et nuisibles”.
 - Convention de Rio de Janeiro 1992 : article 8H, les États doivent “empêcher l’introduction des espèces exotiques qui menacent les écosystèmes, les habitats ou les espèces indigènes”.
 - Protocole de la Convention de Barcelone 1995 : celui-ci recommande
  * de prendre “toutes les mesures appropriées pour réglementer l’introduction volontaire ou, accidentelle dans la nature d’espèces non indigènes et interdire celles qui pourraient entraîner des effets nuisibles sur les écosystèmes, habitats ou espèces (...)
  * de “mettre en oeuvre toutes les mesures possibles pour éradiquer les espèces qui ont déjà été introduites lorsque aprés évaluation scientifique, il apparaît que celles-ci causent, ou sont susceptibles de causer, des dommages aux écosystèmes, habitats ou espèces”.
 
 
 

 Les motifs juridiques nationaux :

 Deux lois françaises vont dans le sens d’une intervention de l’État.

 - La loi n°93-2, loi sur l’eau du 03 janvier 1992 : article 1,
 - La loi n°95-101 du 02 Février 1995 relative au renforcement de la protection  de   l’environnement : article 1,
 
 
II) Les motifs juridiques pour une action de la Communauté européenne :

 

 La Communauté a déjà  plusieurs fois inscrit la protection de l’environnement dans ses priorités. En considérant que le problème de l’algue Caulerpa Taxifolia est un problème qui doit être traité de la façon la plus large possible, il est envisageable, qu’à terme une action communautaire touchant les eaux méditerranéennes de tous les pays membres soit envisagée. La Communauté utiliserait alors l’article 130 R.2 du traité sur l’Union qui permettrait ce type d’action.

 - Le Traité instituant l’Union européenne : Article 130 R.2 : “La politique de la Communauté dans le domaine de l’environnement vise un niveau de protection élevé, en tenant compte de la diversité des situations dans les différentes régions de la Communauté. Elle est fondée sur les principes de précaution et d’action préventive, sur le principe de correction, par priorité à la source, des atteintes à l’environnement et sur le principe du pollueur-payeur. Les exigences en matière de protection de l’environnement doivent être intégrées dans la définition et la mise en oeuvre des autres politiques de la Communauté” (dont la Politique Commune en matière de Pêche).
 
 
III) Les propositions de Loi françaises existantes :

 Deux propositions ont été enregistrées à la présidence de l’Assemblée nationale :

 - “Proposition de loi relative aux actions propres à enrayer l’extension de l’algue   tropicale Caulerpa Taxifolia en Méditerranée”. (Groupe communiste, proposition  portée par MM.François LIBERTI).

 - “Proposition de loi relative à la prévention et au contrôle de la prolifération de l’algue  Caulerpa Taxifolia (VALH) C.AGARDH. (Groupe RCV, proposition portée par  MM.André ASCHIERI).

 En résumé, quels sont les constats et mesures contenues dans les deux  propositions ?

 Elles font les mêmes constats; une prolifération constante de l’algue depuis 1984 (10cm par jour en été), un nombre volumineux d’études scientifiques sur la question, des conséquences catastrophiques pour les activités économiques de la région, des conséquences irréversibles pour le milieu et la présence d’outils juridiques contraignants permettant une réelle politique publique pour enrayer le processus,

 Elles proposent les mêmes types de mesures; inciter les usagers de la mer Méditerranée à contribuer à la lutte contre les algues non indigènes invasives, instaurer un cadre législatif donnant les moyens d’une action de prévention et d’information, mettre en oeuvre une obligation d’alerte et instaurer des mesures strictes en direction de tous les utilisateurs de la mer.
 
 
IV) Le point de vue des professionnels de la Méditerranée :

 

 Après plusieurs années de vives polémiques sur l’origine de l’algue, après de multiples colloques et études sur le sujet, après de multiples recommandations qui n’ont pas connues de suites ( Le comité de coordination mis en place par Monsieur LE DRIAN,  les mesures de Monsieur JOSSELIN), le temps des querelles infructueuses est aujourd’hui dépassé. La ressource continue de diminuer, les professionnels n’en finissent plus de lutter contre les conséquences destructrices de l’algue, alors que celle-ci se développe tranquillement.

 Au moment de la préparation de la prochaine PCP, au moment ou les pêcheries méditerranéennes se voient interdire leurs méthodes de pêche traditionnelles soit disant destructrices, doit-on continuer de laisser se développer cet espace de non droit qui, a priori, ne profite à personne ?

 Les pêcheurs de la Méditerranée demandent instamment, d’une part, que l’État s’engage clairement sur la gestion de ce dossier et prenne des mesures concrètes sur le plan national et communautaire (pour les eaux méditerranéennes des autres États membres) voir international (pour la principauté de Monaco), d’autre part que leurs organisations professionnelles (Comités Locaux, Régionaux et Prud’homies) soient tenues précisément au courant de l’évolution de ce dossier.
 

 Une action de l’État français est nécessaire pour combler se vide juridique et enrayer cette pollution. Si la France ne s’engage pas dans une lutte sérieuse contre le développement de l’algue Caulerpa Taxifolia en Méditerranée elle cautionnera un climat d’illégalité qui ne pourra pas rester inconnu de tous indéfiniment.